Sélectionner une page

Les garanties pertes d’exploitation face à la pandémie actuelle

La perte d’exploitation n’est pas une garantie obligatoire. C’est le moment de bien relire votre police d’assurance.

La garantie perte d’exploitation est un contrat d’assurance qui permet à l’entreprise l’ayant souscrite de se voir garantir les résultats financiers auxquelles elle aurait pu prétendre si aucune sinistre n’était survenu.

Il faut avant tout souligner qu’une telle assurance ne fait pas partie des garanties obligatoires dont la loi impose la souscription.

En outre, le problème que soulève la pandémie de COVID-19 est double : (i) elle nuit à l’ensemble des acteurs de certains pans de l’économie, avec la même virulence, et (ii) elle nuit sans qu’aucun dommage matériel ne puisse être décelé (de la même manière que durant les mouvements des gilets jaunes ou la grève des transports qui ont impactés les acteurs de la restauration en 2019-2020).

En effet, la plupart des systèmes assurantiels fonctionnent de la sorte : lorsqu’un dommage est constaté (une vitre est cassée, un tiroir-caisse est volé…) et que l’assuré rapporte la preuve d’un préjudice (coût de l’intervention d’un vitrier, fonds perdus…), l’assureur vient indemniser, à hauteur du préjudice subit, son cocontractant. 

Ce qu’il faut retenir

En l'absence de tout dommage matériel

1. Peut-on demander une indemnisation sur le fondement de la garantie pertes d’exploitation durant la pandémie actuelle en l’absence de tout dommage matériel ?

La garantie perte d’exploitation est une assurance protéiforme de sorte qu’aucune réponse tranchée ne peut être apportée à la question de savoir si les assurés peuvent ou non faire jouer leur assurance dans le cadre de la crise sanitaire. 

Nombreux sont les contrats qui prévoient que les fermetures « administratives » (souvent liées à des problématiques d’hygiène ou d’accessibilité des locaux des restaurateurs) sont garanties. Toutefois, cette garantie qui, à première vue pourrait être actionnée du fait des pertes occasionnées par l’arrêté portant fermeture des commerces non indispensables depuis le 14 mars au soir, est parfois tempérée par une clause limitative excluant les risques pandémiques. 

Une telle exclusion serait nécessairement applicable à la crise sanitaire du COVID-19. 

Face au risque systémique

2. La particularité des risques dits systémiques

La seconde difficulté liée à la crise sanitaire actuelle tient à la structuration du système assurantiel qui fonctionne en vertu du principe cardinal de mutualisation du risque : c’est grâce aux primes d’assurances de ceux qui ne subissent pas de dommage que les assurances sont financières capables d’éponger les dommages de leurs coassurés. 

Il existe toutefois un régime spécifique applicable aux suites des catastrophes naturelles : la loi oblige les assureurs à étendre leur garantie dans certains cas sur le fondement de l’article L125-1 du Code des assurances qui dispose, s’agissant des pertes d’exploitation, 

« […] si l’assuré est couvert contre les pertes d’exploitation, cette garantie est étendue aux effets des catastrophes naturelles, dans les conditions prévues au contrat correspondant.

Sont considérés comme les effets des catastrophes naturelles, au sens du présent chapitre, les dommages matériels directs non assurables ayant eu pour cause déterminante l’intensité anormale d’un agent naturel, lorsque les mesures habituelles à prendre pour prévenir ces dommages n’ont pu empêcher leur survenance ou n’ont pu être prises. […]»

Cette disposition connait deux limites importantes : (i) pour qu’une telle garantie s’applique, il faut que « l’état de catastrophe naturelle » soit constaté par arrêté interministériels et (ii) la couverture assurantielle des catastrophes naturelles est cantonnée aux préjudices « prévus au contrat » qui généralement ne prévoient qu’une prise en charge des dommages matériels directs causés aux biens. 

Or, la pandémie actuelle, à la différence d’une catastrophe naturelle (séisme, tsunamis, inondations…) ne cause pas de dommage matériel direct aux biens des assurés. 

Aussi, même si l’assurance pertes d’exploitation pouvait être actionnée, elle ne couvrirait que les dommages matériels directs et les pertes d’exploitation consécutives à ces dommages matériels.

Laure DIU LAMBRECHTS

Avocat

Faire une déclaration de sinistre

3. L’avenir de la garantie pertes d’exploitation

Face aux refus des assureurs de s’impliquer dans la prise en charge des conséquences économiques de la pandémie actuelle, le gouvernement les enjoints de participer à l’effort de solidarité nationale. 

Les assureurs, quant à eux maintiennent leur position : ils ne sont pas en mesure d’assurer des risques systémiques en conservant le modèle classique de leur financement.

Toutefois, la recommandation du cabinet FB AVOCAT, si vous avez souscrit une assurance pertes d’exploitation, est de déclarer votre sinistre auprès de votre assureur – si la garantie vous est refusée, prenez conseil auprès d’un avocat spécialisé – une analyse précise de votre police d’assurance pourrait permettre une indemnisation, au moins partielle de votre perte financière.